"L’expansion du djihadisme dans les régions limitrophes est une menace croissante pour la Côte d'Ivoire’’ (Alexandra Heldt, Directrice Afrique de l'Ouest de la Fondation Friedrich Naumann)

Publié le 16 nov. 2023 à 07:38

  • "L’expansion du djihadisme dans les régions limitrophes est une menace croissante pour la Côte d'Ivoire’’ (Alexandra Heldt, Directrice Afrique de l'Ouest de la Fondation Friedrich Naumann)

Crédit Photo : SERCOM Fondation Friedrich Naumann

Dans cette interview, Alexandra Heldt, Directrice Afrique de l’ouest de la Fondation Friedrich Naumann partage ses impressions sur son séjour en terre ivoirienne. "Nous observons une montée du populisme qui constitue un fléau, combiné à l’expansion du djihadisme dans les pays voisins de la Côte d’Ivoire. Ceci représente une menace croissante et il est impératif de rester vigilants pour prévenir une aggravation de ces situations", a-t-elle indiqué.

Alexandra Heldt a d’abord parlé de l'importance stratégique de la Côte d'Ivoire pour la Fondation, de ses rôles en tant que responsable de l'Afrique de l'Ouest, et des défis uniques auxquels sont confrontés le Mali, la Côte d'Ivoire et le Sénégal. Avec un accent particulier sur la jeunesse, Madame Heldt a abordé les questions de sécurité, de migration, d'instabilité politique, ainsi que les opportunités économiques entre l'Allemagne et la Côte d'Ivoire, sans langue de bois

Vous êtes en Côte d'Ivoire depuis août 2023. Quelles sont vos impressions et comment vous sentez-vous dans ce pays ?

Je suis profondément ravie d'être ici, ayant été reçue avec une chaleureuse hospitalité. Originaire d'Allemagne, j'ai travaillé les quinze dernières années à Berlin au sein des fédérations des industries allemandes. Ces fédérations assurent un rôle de représentation pour l'ensemble du secteur industriel allemand. J'y ai beaucoup œuvré en lien avec l'Afrique, bien que sans y résider. Aujourd'hui, je me trouve enfin sur ce continent, une présence qui m'enchante profondément.

Pourquoi avez-vous choisi spécifiquement la Côte d'Ivoire comme lieu de travail?

Comme je l’ai indiqué, durant les 15 dernières années, j’ai beaucoup travaillé sur des projets liés à l'Afrique, mais je ne l'ai pas fait directement depuis le continent. C'est donc avec un grand enthousiasme que j'ai saisi l'opportunité de m'impliquer de plus près et de me confronter directement aux problématiques que j'observais jusqu'alors à distance. Aussi, la Côte d’Ivoire est un choix stratégique pour la Fondation Friedrich Naumann, qui y est implantée depuis de nombreuses années. Nous disposons d'un bureau local, témoignant de notre engagement de longue date dans le pays. En tant que responsable de l'Afrique de l'Ouest, basée à Dakar, je supervise nos activités non seulement en Côte d'Ivoire, mais aussi au Sénégal et au Mali. Cette répartition géographique de la Fondation dans la région il y a quelques années est une décision qui me semble à la fois judicieuse et pertinente pour nos objectifs.

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Vous avez mentionné précédemment le Mali, la Côte d'Ivoire et le Sénégal. Actuellement, le Mali fait face à des enjeux de sécurité, notamment liés au terrorisme. En Côte d'Ivoire et au Sénégal, les élections présidentielles sont prévues respectivement pour 2025 et 2024. Dans ce contexte, quelles sont vos priorités pour ces États ?

Si je devais identifier une priorité, ce serait vraiment la jeunesse. Je crois qu’il faut vraiment adresser les problématiques de la pauvreté, de l'éducation, et du manque de perspectives. Concernant les élections à venir au Sénégal en 2024 et en Côte d'Ivoire en 2025, ma position n'est pas celle d'une politicienne dans ces pays, mais plutôt celle d’une observatrice et partenaire. Mon rôle premier est d'écouter, de conseiller et de soutenir pour aller dans la bonne direction des choses.

Nous avons été témoins de violences au Sénégal il y a quelques mois, reflet d'une jeunesse frustrée, privée de perspectives, et en proie au désespoir face à certaines dynamiques politiques. Cette situation a conduit de nombreux jeunes sénégalais à risquer leur vie en mer, cherchant un avenir meilleur. Ce cycle ne peut pas perdurer. Il faut y mettre fin en créant un environnement propice pour l’épanouissement des jeunes sur le continent africain.

À la Fondation, nous nous engageons activement pour répondre à ces défis. Nous mettons en place de nombreuses formations dans les domaines entrepreneurial, politique et juridique, visant à renforcer les capacités des jeunes et à les encourager à rester dans la région. Nous sommes convaincus qu'il existe de belles perspectives en Afrique de l'Ouest, et notre mission est de les rendre accessibles à la jeunesse.

Vous faites donc de la jeunesse votre priorité face aux problèmes de sécurité, de migration et aussi d’instabilité politique ?

La Jeunesse en Afrique de l'Ouest est nombreuse, entreprenante et dynamique. Il est important de la prendre en compte dans la résolution des problèmes de sécurité, de migration et d’instabilité politique. Nous observons également une montée du populisme qui constitue un fléau, combiné à l'expansion du djihadisme dans les régions limitrophes, qui représente une menace croissante. Il est impératif de rester vigilants pour prévenir une aggravation de ces situations. Les jeunes, souvent désespérés et en quête de perspectives, se trouvent malheureusement au cœur de ces mouvements. Ils sont les plus vulnérables et victimes de ces dynamiques destructrices. La jeunesse doit être notre priorité à tous.

En Côte d'Ivoire, il y a un contexte économique très favorable, caractérisé par une économie libérale. Cette situation est en parfaite adéquation avec l'idéologie de la Fondation Friedrich Naumann, le Libéralisme. Comment la Fondation pourrait-elle contribuer à renforcer les partenariats ?

Je vous remercie pour cette question qui soulève un point qui me tient particulièrement à cœur. En effet, nous agissons en tant qu'interface entre les organisations locales et internationales, ce qui implique une interaction étroite entre les entreprises de Côte d'Ivoire et d'Allemagne. La Côte d’Ivoire a justement la chance d’avoir une chambre de commerce allemande ouverte depuis quelques mois seulement. Cette évolution témoigne de l'intérêt croissant des entreprises allemandes pour la Côte d'Ivoire et reflète la volonté du gouvernement allemand de renforcer ces liens économiques.

En tant que partenaire de la chambre de commerce allemande et forte de mon expérience antérieure dans ce secteur, ainsi que de mon réseau étendu, je m'engage activement à forger des liens plus solides entre l'industrie allemande et l'économie ivoirienne. Notre rôle est essentiel pour faciliter et promouvoir ces partenariats économiques bilatéraux.